vendredi 18 décembre 2009

Apparences.

Séquence 1 : Métro parisien / Intérieur – Jour.

Un grand nombre de citadins et de touristes se pressent sur le quai du métro. Les gens se bousculent pour rentrer dans les wagons bondés. Un bel homme mince d’une trentaine d’années, élégamment vêtu d’un costume et à l’allure élancée, est appuyé contre un mur. Il observe, lassé, la foule bruyante qui se mélange sur le quai. L’homme se passe la langue sur les lèvres de manière hautaine, levant un sourcil et le menton, méprisant du regard un enfant qui s’est approché de lui de trop près. Il sort la main de sa poche et, d’un geste vague, éloigne le petit garçon de lui.


Séquence 2 : Rue passante / Extérieur – Jour

L’homme est dans les escaliers d’une bouche de métro, il avance, pressé, une mallette à la main. Il soupire et est stoppé dans son élan à cause des gens devant lui qui ne marchent pas aussi vite. Il piétine sur place, lève les yeux au ciel, gonfle d’air ses joues avant de souffler un grand coup d’agacement. L’homme parvient à se frayer un passage parmi la foule, jouant des coudes, de force. Arrivé en haut des escaliers, il part rapidement droit devant lui, sa silhouette élancée disparaissant au détour d’une rue, le son de ses pas s’éloignant.


Séquence 3 : Rue passante / Extérieur – Jour

Mallette à la main, l’homme sort précipitamment d’un immeuble et se rend dans le jardin public en face de lui, au pied de l’habitation. Il s’assoit lourdement sur un banc, croise les jambes et observe les gens présents avec lui : des enfants surveillés attentivement par leur mère, un couple de personnes âgées nourrissant des pigeons, un adolescent à la mine triste aux écouteurs dans les oreilles. En passant son bras par-dessus le dossier et se retournant, il voit entrer un balayeur public qui avance tranquillement, malgré ses coups d’œil furtifs jetés de chaque côté. Celui-ci est plutôt rondouillard, des cheveux frisés noirs tombant sur son visage aux joues gonflées. Il marche courbé, la tête rentrée entre ses épaules, ne cessant de jeter des regards plissées autour de lui. Il pousse un chariot contenant le nécessaire pour son métier : balais, râteaux, pelles… Le balayeur avance en direction de l’homme en costume. Il s’en approche, s’arrête un instant, fronçant les sourcils de sa figure pâteuse, et reprend son chemin. L’homme à la mallette l’observe qui s’avance, étonné mais ignorant ses regards insistants. Le balayeur l’interpelle, mais fixe droit devant lui tout en lui parlant.

LE BALAYEUR (avec un fort accent russe, chuchotant, discret)

Dîtes-moi, clair-obscur ?

L’HOMME (surpris)

Pardon ?

LE BALAYEUR (agacé)

Clair-obscur ?

L’HOMME (dédaigneux)

Très bon choix.

Le balayeur bondit en avant, sort un paquet de son manteau et le donne à l’homme en costume. Il s’en va, trottinant de plus en plus vite. L’homme examine le mystérieux paquet sur lequel est inscrit maladroitement en lettres rouges : RUSSIA. Il relève aussitôt la tête et cherche des yeux le balayeur qui n’est plus visible. Il retourne plusieurs fois le paquet dans entre ses mains, le faisant tressauter et le portant à son oreille en le secouant rapidement. Le trentenaire se lève, ouvre sa mallette qui cliquète et essaie de ranger le paquet à l’intérieur mais celui-ci est trop imposant.


Séquence 4 : Rue passante / Extérieur – Nuit.

La nuit tombe, les rues passantes se font sombres et désertes. L’homme marche vivement, le paquet serré sous le bras, aux aguets du moindre bruit. Une ombre se profile sur le mur en face de lui. Il prend peur et se retourne. Rien. Il resserre l’étreinte du paquet et reprend son chemin. Des bruits de pas se font entendre. L’homme lève les yeux, serrant le paquet contre son cœur. Il se met à courir droit devant lui dans la rue pavée. Il s’arrête au détour d’une rue, essoufflé et s’essuie le front ainsi que les cheveux d’un revers de main. Des passants l’observent, à la fois surpris, et inquiets. L’étrange ombre réapparaît sur le mur à ses côtés. Apeuré, le trentenaire reprend sa course, se tenant le côté, trop fatigué pour courir normalement il boîte discrètement. D’une main il défait le col de sa chemise et enlève sa veste sans lâcher le précieux paquet. Il parvient à un pont. Il s’approche de la balustrade, tendant le bras qui détient le paquet au-dessus de l’eau sombre et agitée. Il grommelle une phrase inaudible, agite le paquet au-dessus du vide violemment avant de secouer nerveusement la tête et de le remettre sous son bras. Il reprend sa route plus tranquillement. Alors qu’il marche dans une ruelle, un craquement puis un coup de feu se font entendre. L’homme en costume chute et du sang provenant de son dos s’écoule sur les pavés. Un jeune garçon sort de l’ombre, se saisit du paquet gisant sur le sol et s’enfuit. Des personnes sortent des habitations environnantes en poussant de grands cris de surprises et de terreur. Une foule affolée commence à se former autour du cadavre. La mallette de l’homme s’est ouverte en tombant, à l’intérieur des flacons de parfum sur lesquels est inscrit : Clair-Obscur.


FIN

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