Tout a commencé par cette chanson mélancolique. Je m’étais interdit de l’écouter depuis déjà longtemps, la bannissant dès que j’en voyais le titre ou que j’en apercevais au loin les accords de guitare. Interdite, point barre. Puis petit à petit, sournoisement, elle est parvenue à se refaire une place au creux de moi. Elle a agit lentement, délicatement, comme elle sait si bien le faire. C’est d’abord les premières notes qui sont revenues, qui ont frappé à ma porte. J’ai fais la sourde oreille, mine de ne pas la reconnaître. Alors elle est restée sur mon palier, longtemps, longtemps. Agacée, à bout de souffle, je l’ai lâchement laissé entrer. Elle a repris possession de ses biens, de ce qui lui appartient depuis la première écoute : tout mon être, de l’esprit au sourire. Elle a piétiné tout le reste et s’est élevée en maître sur mes agissements et mes pensées. J’étais soumise à cette amie revenue d’outre-tombe à qui j’avais longtemps tourné le dos, la niant corps et âme. Mais pendant combien de temps sommes-nous assez fort pour renier une partie de nous même ? Elle a repris ses petites habitudes, nous avons continué de vivre dans notre quotidien, comme si jamais nous avions été séparées. En sortant elle me tient la main, et je sais qu’en rentrant seule le soir je la retrouverai comme unique compagnie, elle qui m’attend de pied ferme, patiemment. Je lui confie tout ce que je porte de trop lourd et elle en prend la charge un moment avant de me refourguer le plus pesant sur mes frêles épaules. Tantôt une béquille, tantôt l’handicap même. Alors c’est à ce moment que me parvient le premier couplet, que je récite telle une prière de supplication. Et quand arrive le refrain, c’est le débordement, l’explosion. Est-il possible de connaître des paroles plus que par cœur ? Car avec elle, c’est plus que ça, une fusion. Dès la première écoute j’ai su qu’elle deviendrait une allier fidèle, je connaissais les dangers qu’elle engendrerait mais comme d’habitude, je n’ai su dire non. Alors je me laisse guider par la voix de son chanteur et chaque accord, dont je peux anticiper jusqu’à l’ultime note, même sans rien y connaître au solfège. Mes yeux rougissent, mes mains tremblent un peu et des rigoles se forment enfin sur mes joues enfantines. Personne ne pourra m’empêcher de l’écouter, elle qui ne permet à la blessure de se fermer définitivement. Elle est malgré tout la bienvenue, car elle me porte loin de tout, même si elle m’enferme toujours plus. Elle coupe tous les ponts avec l’extérieur, m’empêchant d’envoyer un ultime appel à l’aide. Elle se dresse au milieu de mon chemin, m’obligeant à faire demi-tour et à rester avec elle, indéfiniment. Ma main a tremblé ce soir-là, mes poignets également ont fléchi, malgré moi. Je déteste ça, et pourtant, je m’accroche à cette preuve de survie. Je me hais, et je la hais elle de me mettre dans cette situation où elle me sait si faible que je ne peux refuser cette manifestation du sang coulant dans mes veines, si fragiles et si innocentes. Je suis naïve de croire que c’est une porte de secours. Je secoue bêtement la tête d’un côté, puis de l’autre, mouvement rythmé par cette batterie fantomatique. Je me surprends même à apprécier ces moments d’intimité que j’ai avec elle. Alors je ferme les yeux, ma tête se renverse à l’arrière et je plane. Je suis ailleurs, et j’y suis bien. Je voudrais que cette insouciance dure toujours plus longtemps. Je vais dans ce cas sur mon balcon, et la fumée me permet de retrouver cette nausée que j’aime tant. Cela devient une rengaine, presque un rituel, morbide mais inévitable quand on frappe aux portes de la nostalgie.
dimanche 22 novembre 2009
- Juste envie d'essayer un tour au paradis / Born to be alive.
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